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Emploi: Le parti de l'Istiqlal ne croit pas à l'optimisme du gouvernement
"Le rythme de croissance de l'emploi a sérieusement baissé". Par Leïla Hallaoui



PARTI - “Jerada est un cas parmi d’autres. Il ne faut pas que nos politiques publiques et surtout notre politique économique se transforment en de simples extincteurs de foyers de feu”. Un mois après sa nomination à la tête de l’Alliance des économistes istiqlaliens (AEI), l’ancien ministre du Commerce extérieur et ancien ministre délégué chargé des Marocains résidant à l’étranger, l’économiste Abdellatif Maâzouz, exprime, au HuffPost Maroc des inquiétudes qu’il qualifie de “légitimes”. Décrites dans un communiqué de l’AEI, publié ce mardi 17 avril, celles-ci portent sur un doute, celui de voir le plan d’action du gouvernement pour la promotion de l’emploi atteindre son but. Et pour cause, l’Alliance estime que le gouvernement, qui veut créer plus de 1,2 millions d’emplois sur une période de 4 années, n’en a réellement ni les moyens, ni une vision claire.

“Le principal problème, aujourd’hui, c’est que le Maroc a énormément investi dans les infrastructures et la mise à niveau de son économie en matière de capacité d’accueil et de compétitivité de l’économie. Cela a généré une croissance, insuffisante par rapport aux investissements réalisés”, estime le président de l’AEI. Et de préciser que cette insuffisance trouve une explication dans une croissance inégale n’ayant concerné qu’une partie du territoire et qui “exclut le monde rural”.    

Un rythme de croissance inquiétant

Autre problème soulevé par Abdellatif Maâzouz: la non productivité de l’emploi. “Nous avons des investissements importants, mais qui ne génèrent pas le taux de croissance escompté. Ce sont des investissements non producteurs d’emplois parce qu’ils ne sont pas directement productifs, ils appartiennent au secteur public”, constate-t-il. Moins de croissance et moins d’emplois qu’auparavant, pour l’économiste, il est clair que le Maroc marque un recul: “le rythme de croissance de l’emploi a sérieusement baissé”.  

Preuve à l’appui, l’AEI indique que le rythme annuel de création d’emplois se situait à un niveau de 135.000 emplois par an, en moyenne, entre 2007 et 2011, à moins de 50.000 emplois par année, en moyenne, depuis 2012. “Il y a un véritable appauvrissement en terme de génération d’emplois, par rapport aux investissements”, soutient Abdellatif Maâzouz, justifiant la surprise de son équipe à l’annonce par le gouvernement de passer de moins de 50.000 emplois annuellement à plus de 300.000 par an. “Pour créer de 1,2 millions d’emplois d’ici 2021, on devrait, donc, commencer à générer 300.000 emplois, dès cette année”, souligne le président de l’AEI, affirmant que les mesures récemment annoncées par le gouvernement ont “elles, aussi, besoin de temps pour être mises en place. On ne pourra pas générer de l’emploi rapidement. C’est ce qui justifie notre inquiétude”. 

Pour l’AEI, c’est un effet d’annonce qui risque d’aboutir à “une grande déception”. “Moi, citoyen marocain, lorsque j’entends parler de la création d’autant d’emplois et que je ne vois pas d’emploi autour de moi, je suis frustré!”, explique Abdellatif Maâzouz. Et d’espérer que le gouvernement présentera, dans les prochains jours, comme il l’a annoncé, des mesures concrètes en matière de promotion de l’emploi. 

Vision claire

“Pour dépasser ce grand fléau du chômage, il faut d’abord mettre en place un cadre global qui permettrait de donner une vision claire et définir un mode de fonctionnement de notre économie”, ajoute le président de l’AEI faisant référence à l’instauration d’un nouveau modèle de développement auquel le roi a appelé.  

La relance de l’emploi ne sera réalisable qu’à la condition d’en définir les moyens, les délais, le déploiement par région... “A l’AEI, nous estimons que l’échéance que se donne le gouvernement (2021) pour y parvenir est trop courte. Tant que les moyens ne sont pas clairs et précis, on ne peut y croire en tant qu’acteurs politiques et économiques de notre pays”, reconnait Abdellatif Maâzouz.

Voir pour croire, l’AEI, qui se veut être le think tank économique du parti de l’Isltiqlal, a partagé son constat dans le but “de critiquer d’une manière constructive” le gouvernement. Présente au sein du parti, cette alliance qui était présidée par l’ancien ministre du Tourisme, Adil Douiri, a connu un répit, au cours des deux dernières années en raison des conflits internes, avant de reprendre ses activités. Des propositions, elle en fera aux composantes du PI en matière de développement économique. Son actuel président l’affirme: “Nous travaillons sur un programme autour d’un ensemble de groupes thématiques qui se penchent sur des questions d’actualité que nous estimons prioritaires pour notre pays”.